Quel bulletin de vote glisser dans l’urne ? Telle est la question que de nombreux électeurs se posaient encore à la veille du premier tour de l’élection présidentielle, le 22 avril. Dans le cadre de leur stage à LaTéléLibre, trois Reporters citoyens – Hana Ferroudj (Stains), Johanna Clairet et Mohamed Mahieddine (Créteil) – sont allés à la rencontre de ces indécis et ont essayé de comprendre pourquoi leur camp, cette fois, était particulièrement florissant.
Les indécis de la présidentielle par latelelibre
A la veille du premier tour, selon un sondage Ifop, près de 35 % des électeurs se disent toujours indécis sur leurs intentions de vote. Plus du tiers des votants sont donc encore dans le doute alors qu’un quart seulement se trouvaient dans le même cas en 2007. Autre phénomène qui va dans le même sens, la grande volatilité de l’électorat : près d’un votant sur deux a changé d’intention dans les six derniers mois. Ainsi, le cru 2012 de la présidentielle restera marqué par un niveau record d’indécision, que l’on peut expliquer par de multiples raisons.
D’abord les bilans successifs des locataires de l’Elysée, et de leurs gouvernements respectifs, suscitent la défiance des Français. « Plus de 70% d’entre eux estiment que les politiques ne se préoccupent pas de ce que les gens pensent et vivent. Ils ont le sentiment d’avoir été abandonnés par la classe politique », affirme Bruno Cautrès, chercheur au Cevipof (le Centre de recherche politique de Sciences-Pô), que nous sommes allés interroger. Ce détachement – des jeunes notamment – est aussi justifié par la non-prise en compte des problèmes prioritaires que sont l’emploi, l’éducation ou le logement.
De nombreux concitoyens semblent également déçus d’une campagne, qui n’apparaît pas toujours à la hauteur pour les uns ou qui est jugée trop violente par les autres. Les indécis se recrutent souvent parmi ceux qui sont le moins marqués idéologiquement : en 2007, 40 % d’entre eux affirmaient n’être « ni de gauche, ni de droite ». Le fond comme la forme semblent perturber une bonne part de l’électorat. Selon un sondage réalisé le 5 avril dernier par BVA, cela pourrait présager d’un potentiel d’abstention de l’ordre de 20 à 25 %, soit le taux le plus important après 2002.
« Les plus indécis sont les plus dépolitisés et les moins intégrés socialement, ceux qui ont le sentiment d’un jeu qui n’est pas le leur et dont ils ne maîtrisent pas les codes », poursuit Bruno Cautrès. Les jeunes, et notamment les primo-votants, sont particulièrement concernés : selon un sondage Ifop de mars 2012, 59 % des 18-22 ans n’étaient toujours fixés dans leur intention.
On sait que les électeurs ont de plus en plus tendance à ne valider leur choix qu’au tout dernier instant. Voilà cinq ans, 14 % s’étaient décidés en entrant dans l’isoloir ! Compte tenu de la progression de l’indécision, un Français sur cinq pourrait faire de même cette fois-ci. À ce niveau-là, bien des surprises sont encore possibles.
Mohamed Mahieddine (reportage et texte)
Hana Ferroudj (reportage)
Johanna Clairet (reportage et montage)