Confiance, autonomie et polyvalence sont les maîtres mots de cet établissement autogéré. L’école Perceval, située à Chatou (78), applique la pédagogie Steiner-Waldorf, qui s’adapte au profil de chaque enfant. Reportage sur une école pas comme les autres.
Par Jean-Yves Bourgain
« Reconnaître et développer les capacités de chaque enfant. » Telle est la devise de l’école Perceval de Chatou (Yvelines), l’une des mille écoles Steiner-Waldorf dans le monde. Ouverte en 1957, elle accueille aujourd’hui 360 élèves, du jardin d’enfants au baccalauréat, dans une belle bâtisse du XIXè siècle en bord de Seine. Fondée sur les valeurs de liberté, de confiance et d’enthousiasme, plutôt que celles de l’ambition, l’autorité et la compétition, la pédagogie appliquée est celle développée par l’autrichien Rudolf Steiner, au début du XXe siècle.
De la « 1e classe » (CP) à la « 12e » (Terminale), une large place est laissée à l’eurythmie – l’art du mouvement, aux arts et à l’artisanat : théâtre, musique, peinture, textile, forge, menuiserie, travail du cuivre… « On touche à tout. Ça permet de découvrir ses hobbies, et ça allège l’emploi du temps quand on n’est pas scolaire… » note Sarah, élève de Terminale. Le pluralisme des approches et des outils permet de s’adapter à tous les enfants, qu’ils aient un profil plutôt intellectuel, manuel ou artistique. À l’entrée, la sélection ne s’opère pas sur les résultats mais sur la motivation des élèves.
L’école Steiner, c’est aussi l’école sans note ! Jusqu’en 4e, on habitue ainsi les enfants à distinguer effort et récompense. Et pour apprécier l’évolution de chacun, c’est le même instituteur – secondé par les nombreux intervenants – qui suit l’enfant durant tout le cycle primaire. Côté emploi du temps, l’originalité est aussi de mise. On privilégie un « enseignement par périodes » : jusqu’en Seconde, les élèves passent chaque matin deux heures sur une même matière pendant trois semaines, avant de consacrer trois semaines à une autre matière. « Ça nous permet de rester concentré sur un sujet et de ne pas oublier ce qu’on a fait la veille ! », remarque Sarah.
Arrivée à l’école Perceval en classe de 4e, Sarah avait noté un grand changement par rapport à l’école publique. « Avant, je n’aimais pas l’école. Je stressais avant d’y aller, j’avais peur de certains professeurs. Mais aujourd’hui, je prends plus de plaisir à y aller. Ici, on ne se sent jamais rabaissé. Chacun travaille à son rythme. »
« Devenir quelqu’un de bien et penser par soi-même »
Chaque année, les enfants et adolescents voyagent, découvrent la nature ou divers secteurs d’activité, comme par exemple une visite à la ferme en CE2, un stage d’astronomie en 6e, un stage forestier en 3e, ou encore un séjour de trois mois à l’étranger proposé en Seconde. En classe de 1ère, les élèves arrêtent même les cours pendant quatre semaines pour préparer une pièce de théâtre. « On les voit changer, se métamorphoser complètement », observe M.R., à la fois professeure d’anglais et parent d’élèves. Un fonctionnement privilégié rendu possible grâce à des effectifs réduits – une seule classe par niveau.
Quel est donc le coût de cette scolarité sur mesure ? À partir de 3 000€ par an pour cet établissement, privé sous contrat de la maternelle au collège et privé pour la partie lycée. Sachant que des aménagements sont possibles en fonction des revenus des parents. C’est bien moins cher qu’aux Etats-Unis (20 000 $ l’année), mais cela reste inaccessible aux plus défavorisés. Le public de l’école est donc plutôt aisé mais « certains parents font des sacrifices pour pouvoir payer la scolarité à leurs enfants », rappelle M.R.
Fondée sur le volontariat, l’école est autogérée. « L’école demande beaucoup d’investissement, à la fois de la part des parents, des professeurs et des élèves. C’est un travail triangulaire. Nous passons beaucoup plus de temps à l’école que dans un établissement classique. » Recrutés après consultation de leurs collègues, les professeurs se réunissent chaque semaine. « Nous nous remettons sans cesse en question. Nous essayons d’inventer de nouvelles pratiques pédagogiques, tout en gardant nos spécificités. », souligne M.R.
Formée à la pédagogie Steiner « en interne » à l’école Perceval, M.R. y exerce depuis huit ans, après avoir passé six ans dans l’enseignement public. Si elle a accepté de toucher un salaire moindre, c’est parce que le fonctionnement de l’établissement lui convient nettement mieux : « Enfin, les élèves sont considérés comme des personnes autonomes et responsables ! Nous leur faisons davantage confiance. Pour les suivre sur plusieurs années, nous les connaissons bien, nous savons comment les mettre en valeur. L’objectif dans cette école, ce n’est pas de préparer tel emploi ou tel diplôme (bien que les résultats soient bons), mais de devenir quelqu’un de bien et de penser par soi-même. »
Informations
Journée portes ouvertes au public le 22 mars prochain de 14h à 18h30, et présentation des « chefs d’œuvre » des élèves de Terminale le samedi 8 mars. Sarah a choisi le slam. Venez l’écouter !
5 Avenue Eprémesnil
78400 Chatou
01 39 52 16 64