EURO 2016. Les préjugés veulent que les hommes soient comblés et les femmes complètement désespérées face à un match de foot. Qu’en pensent les femmes supportrices ? Reportage lors du match Allemagne-Pologne.
Par Samia BENZAID
17h. À peine arrivé à la station RER « La Plaine, Stade de France », le regard peine à trouver des femmes dans la foule. Dans cette marée humaine de supporters, il y a vraiment beaucoup, beaucoup plus d’hommes que de femmes ! Ce jeudi 16 juin 2016, l’Allemagne et la Pologne s’affrontent. Pourquoi les femmes ne seraient-elles pas, elles aussi, de la partie ?
« Vive la Pologne !« , s’écrie Anastazia, 21 ans. Enfin une femme en vue ! Vêtue du maillot blanc de l’équipe nationale et d’une écharpe rouge de supporter, la jeune femme est venue en compagnie de sa grand-mère, de sa mère et de ses cousines spécialement pour l’occasion, car il était hors de question pour elles de rater ce moment fort. Agatha, la plus jeune de ses cousines, a troqué sa jupe contre un short de la tenue officielle. Il ne lui manque plus que les crampons ! Pourtant elle avoue être plus attirée par les joueurs que par le jeu et s’empresse de citer l’attaquant polonais Robert Lewandowski : « Je veux l’épouser, je l’aime à la folie ! », s’enthousiasme la jolie brune, à côté de sa grand-mère qui la nargue. Celle-ci n’a que faire du foot et des beaux garçons, « moi, je suis là pour être auprès de ma famille », précise-t-elle.
« Ce n’est pas un problème pour nous qu’elles regardent le foot, si elles font le ménage après ! », ironisent les compagnons de Monica et de Pelagia, deux autres Polonaises. Une touche d’humour qui en dit long sur la perception des hommes à propos des femmes qui suivent le foot. Ils assument leur côté macho et admettent aussi être ravis que leur conjointe les accompagne. Le mari de Pelagia a même pris un plaisir fou à dessiner un ballon sur le ventre de sa femme enceinte. La trentaine, Monica et de Pelagia supportent le foot certes, mais seulement pour les grandes compétitions. « Après l’Euro, je suivrais le Mondial », ajoute Monica, d’un ton ferme et exaltant. Une chose est sûre, fille ou garçon, l’ambiance est au rendez-vous : on chante, on saute et on boit de toute part.
Mais qui a dit que les femmes devaient se contenter du rôle d’accompagnatrice ? C’est avec aisance qu’Héloïse, 25 ans, parle foot à qui veut l’entendre : « L’Allemagne a été championne du monde à quatre reprises, notamment en 2014. Comment ne pourrions-nous pas remporter l’Euro ? », analyse la fervente supportrice qui revêt les couleurs de l’Allemagne de la tête aux pieds, du chapeau au drapeau en passant par le maillot et l’écharpe aux couleurs rouge, noir et jaune. « Rien ne nous fais peur, seule l’Espagne nous effraie », ajoute-t-elle passionnée, entourée de ses amis, Bianca, Caroline et Meryl. « Il n’y a pas que les hommes qui ont le droit d’aimer ce sport populaire », affirme Bianca pour clore le débat. Ces supportrices pourraient en bluffer plus d’un.
Côté match, à quelques minutes du coup d’envoi, l’excitation des supporters se ressent de plus en plus. À l’entrée du stade, une rivalité bénigne s’installe entre supporters de sexe masculin. Ursula, bientôt 40 ans, va pour s’interposer entre les deux hommes, un verre à la main afin d’apaiser les esprits : « Un peu de bière, pour une foule en folie », s’exclame-t-elle avec un grand sourire. Une méthode douce qui a su charmer la partie allemande. Le foot est un jeu dont les règles n’ont pas de sexe et une touche féminine dans un monde, à première vue machiste, ne peut pas faire de mal. Même si lors des compétitions féminines, le public reste majoritairement masculin. Le Mondial féminin de 2019 ouvrira-t-il quant à lui, enfin les portes à une plus grande mixité ?