Les dernières élections municipales ont montrées que les Français ne croyaient pas en l’action du gouvernement. Pourtant, l’ex ministre de la Ville, François Lamy s’est attelé aux problèmes des quartiers et a fait voter une loi dans la plus grande indifférence. Une interview réalisée – avant les remaniements ministériels – avec John-Paul Lepers et deux Reportrices citoyennes (Assa et Atouma Diarra).
Lamy des quartiers fier de sa loi par latelelibre
«Ici, c’est un Ministère fumeur», plaisante le ministre François Lamy. Il est 9h ce matin là, et nous sommes invités pour un petit déjeuner en tête-à-tête avec le ministre en charge de la ville et de la cohésion sociale.
John-Paul présente le projet Reporter Citoyen à un ministre détendu et à l’écoute. Ma sœur Atouma et moi-même pourrons également nous exprimer tour à tour. Ici, la déco est moderne : des murs blancs, des éclairages indirects, un palais de la République sans les ors traditionnels !
« Nous avons déménagé il y a quelques jours. J’ai découvert cet ancien ministère entièrement rénové qui n’était affecté à personne ». Visiblement, le ministre a déjà mangé car il ne prend pas de croissant mais allume une deuxième cigarette. «Une fois que j’ai décidé de m’installer ici, plus personne n’aurait pu me déloger ! », confie déterminé ce proche de Martine Aubry. « Sauf un remaniement…», ajoute ce représentant de l’aile gauche du gouvernement.
Après cette conversation informelle, nous passons dans son bureau adjacent. Pour l’interview, Vincent y installe sa deuxième caméra sur pied. Un document «top secret» trône sur son bureau. Nous aurons donc accès en avant-première à la nouvelle carte des quartiers compris dans le dispositif !
Une loi passée inaperçue
Le 13 février 2014, une nouvelle loi passée inaperçue a été définitivement adoptée par des députés aux horizons politiques distincts : la « loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine ».
Derrière ce nom fourre-tout se cache une volonté du gouvernement de redéfinir la carte française des quartiers «les plus pauvres». C’est dans un contexte de crise, de méfiance et de défiance que s’inscrit cette loi portée par le ministre de la ville François Lamy.
Sa mission ? Impulser une nouvelle politique de la ville après des décennies d’échecs. Le maître mot : «réduire les inégalité territoriales» en établissant une «structure» axée sur le développement des emplois, des logements mais aussi des transports. En d’autres termes, rétablir un tissu social et une connexion avec ces quartiers oubliés. De 2492 quartiers placés en contrat de ville et bénéficiaires d’aides au développement plus importantes, le nombre de territoires passerait à 1300. Une réduction basée sur un critère unique : la pauvreté.
Pour y arriver, le ministre de la Ville compte bien sur la coopération de ses collègues auxquels il fait appel sans détour. Aucun des crédits de son Ministère ne sera engagé sans un geste des Ministères concernés par cette réforme.
«Quand la France va repartir, je ne veux pas que ces quartiers soient mis de côté»
Le ministre de la Ville, qui a commencé la politique à 40 ans -à une «époque où on rêvait encore»- détaille le contenu de sa loi. Il accompagne ses arguments d’exemples concrets, du «quartier des Minguettes à Vénissieux», en passant par Amiens. Le ministre de la Ville insiste sur l’importance des relais, notamment en matière d’emploi pour les jeunes : «J’ai demandé au Préfet de Lyon de recevoir des jeunes en décrochage scolaire pour établir un plan personnalisé pour chacun». Autrement dit, des préfets, des conseillers Pôle Emploi et des personnes relais sur le terrain pour renforcer la cohésion urbaine. S’il déplore les échecs passés des «plans banlieues», il pense ainsi réussir là où les autres ont échoué.
Fort de son expérience en tant que maire de Palaiseau, mandat qu’il avoue avoir préféré, le ministre François Lamy répond sur ce qu’on peut attendre de sa loi, à moyen ou à long terme.
Quel futur pour le ministre ?
Au bout d’une bonne heure et demie d’interview, c’est la réalité qui rattrape le ministre de la Ville ! Il doit rejoindre pour le déjeuner Martine Aubry, alors en pleine campagne municipale à Lille… Des élections municipales déterminantes pour l’avenir politique du ministre de la Ville. Car il ignore si le remaniement lui laissera sa place… Il exclut cependant toute possibilité d’une «mutation» à Bercy. Mais en plein virage social démocrate du Président, la présence de celui «qui a choisi d’être là», au gouvernement, n’est pas assurée… Mais à ce moment précis, une seule préoccupation pour le ministre : prendre son TGV !
Journalistes:
Assa Diarra
Atouma Diarra
John Paul Lepers
Image : Vincent Massot et Flore Viénot
montage: Vincent Massot