Généraliste depuis plus de trente ans, Didier Poupardin est accusé par la Sécurité sociale d’avoir établi des ordonnances non conformes pour les maladies de longue durée. Rencontre avec ce militant de la justice médicale et sociale.
C’est dans la quiétude de son cabinet, installé dans un pavillon de la banlieue sud de Paris, à Vitry-sur-Seine, que le docteur Poupardin me reçoit. Ornant les murs et les étagères de son lieu de travail, de nombreux souvenirs de différents pays, notamment maghrébins, témoignent de l’amitié de ses patients.
L’homme est plein de sagesse. Son attitude calme et son ton posé contrastent avec la radicalité de ses propos et engagements. Alors que la France fait face à la révolution de mai 1968, Didier Poupardin devient praticien avec l’idée d’être utile à la société et pour réaliser (naïvement) un rêve d’enfant. « J’ai toujours essayé de reprendre les bonnes valeurs de mai 68 dans ma pratique médicale. De faire en sorte que les personnes que je soigne soient traitées avec des droits à faire valoir ».
Son projet d’alors, imaginé avec des collègues médecins libéraux ? Créer des mini-centres de santé afin de permettre au plus grand nombre d’accéder au système de soins. Une idée hélas très difficile à mettre en œuvre. D’autant qu’on assiste depuis trente ans à une régression des droits à la sécurité sociale, au prétexte de la lourdeur du déficit de l’assurance-maladie, en réalité « artificiellement construit sur le plan comptable », explique le médecin.
Exemple de cette régression, la plainte déposée par la Caisse primaire d’assurance-maladie (CPAM) du Val-de-Marne contre le docteur Poupardin. Motif invoqué : le remplissage non conforme des ordonnances concernant les maladies de longue durée. Il faut savoir que ces feuilles de maladie, dites « bizones », se présentent en deux zones. La partie A, en haut, est celle où sont prescrits les médicaments relatifs au traitement principal de la maladie de longue durée. Ces médicaments sont intégralement remboursés par la sécurité sociale, qui reconnaît trente affections de longue durée (ALD) telles que le diabète ou la mucoviscidose, après établissement d’un protocole thérapeutique. La partie B, dite « basse », est quant à elle réservée à la prescription de médicaments pour les traitements secondaires, lesquels ne bénéficient pas du remboursement intégral.
Il est donc reproché à Didier Poupardin d’avoir inscrit dans la partie A des médicaments devant se trouver dans la partie B. Ce qui facilite la possibilité de se soigner correctement face aux effets secondaires et maladies engendrées sur d’autres parties du corps par le traitement principal. Car les pathologies ne sont pas strictement étanches les unes des autres. « C’est pas comme le nuage de Tchernobyl qui s’arrête aux frontières ! », plaisante-t-il.
2 612,42 euros : tel est le montant du préjudice « subi » par la sécurité sociale, auxquels s’ajoutent 2 000 euros de frais de justice. Face à cette situation controversée, le praticien veut résister à l’injustice du remboursement partiel. Son combat, soutenu par un grand nombre de confrères et de personnalités tels Christian Favier (président du conseil général du Val-de-Marne) ou Pierre Gosnat (maire communiste d’Ivry-sur-Seine), met en relief les injustices du système actuel, qui « tend vers la privatisation via les mutuelles ».
En attendant la décision du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil, devant lequel le docteur Poupardin a comparu début octobre, son combat jette un pavé dans la mare et doit permettre d’ouvrir le débat. Et, pourquoi pas, permettre à l’homme de se réapproprier ses rêves d’enfants ?
Mohamed Mahieddine
Pour aller plus loin
Le blog du docteur Poupardin :http://didierpoupardin.wordpress.com
Le mail du comité de soutien : soinspourtous@laposte.net