Vissé sur sa planche, Adel* (*tous les prénoms ont été changés) n’arrête pas d’avancer ! Ce jeune palestinien avenant et chaleureux n’a que le skate en tête ! Il se faufile dans la vie à toute allure et est persuadé que sa passion peut apporter la paix entre les peuples. Portrait.
Par Assa Diarra.
Il en rêve même la nuit… A Ramallah en Palestine, Adel n’est guidé que par une seule passion : le skate ! «Aujourd’hui quand on dit Palestine, on pense tout de suite à la guerre. J’aimerais, que ça change. C’est fou mais on ne s’imagine pas que les Palestiniens ont une vie», regrette-il. En quelques mots, Adel pose les choses de manière claire et assumée, fidèle à lui-même. Son physique tranche avec l’image que beaucoup se font des Palestiniens. Sa coupe branchée, ses yeux malicieux et son grand sourire parlent d’eux-mêmes. Cigarette à la main, tout lui paraît si simple, si logique : «Je veux juste profiter de la vie et faire du skate aussi longtemps que je le pourrais». Pour ça, il est prêt à faire des périples. Pour venir, il a dû voyager 16 heures ! Il a relié la Jordanie depuis la Palestine pour prendre l’avion direction Marseille.
Du haut de ses dix sept ans, ce véritable « casse cou » impose le respect ! «Regarde mon genou, j’ai eu un accident de voiture. J’ai répondu au téléphone alors que j’étais en moto. Boum ! Quelques minutes plus tard, je me rendais à l’hôpital», confie-t-il. Il faut dire qu’il vit sa vie comme sa passion et fonce comme sur sa planche. Rentrer dans un moule ? Très peu pour lui ! «Je n’aime pas qu’on m’impose les choses !». Il préfère être à l’initiative. C’est cette audace qui l’a mené à participer à la construction d’un skate parc, à Ramallah, alors qu’il n’avait que 16 ans. Un projet assez incroyable qui a vu le jour grâce à une rencontre. «Charlie Davis, le directeur d’une ONG en Palestine pratiquait le skate. Des enfants ont commencé à s’intéresser à cette discipline et il a voulu leur apprendre. Mais il a pu faire un constat simple : il n’y avait pas d’endroit où faire du skate à Ramallah. Par coïncidence, mon ami et moi qui étions les seuls à en pratiquer en Palestine, avons pu le rencontrer. Là l’idée est née. C’était l’été 2012». Ni une, ni deux, après avoir obtenu une autorisation des autorités de la ville, et 10 000 euros environ d’investissements étrangers, l’aventure est lancée ! Cinq mois plus tard, le skate parc sortait de la terre poudreuse de Ramallah. C’est ce projet fou qu’Adel raconte avec une simplicité et une modestie déconcertante : «C’est pas grand chose tu sais…».
Né à Jerusalem, c’est à Ramallah en Cisjordanie qu’il vit à avec ses parents, un père commerçant et une mère à la maison, son frère et sa sœur. Honnête, il n’hésite pas à confier qu’il est un «privilégié» : il fréquente une école privée, aime porter de beaux costards et profiter des plaisirs de la vie. Ses vacances, ses loisirs, sa petite amie aux Etats-Unis, il glisse d’un sujet à l’autre avec des blagues pour transition. «Je suis une personne normale. Beaucoup de personnes pensent que les Palestiniens sont des terroristes et qu’ils ne vivent que pour la guerre. Ils devraient venir voir…» et d’ajouter «la guerre que nous vivons est uniquement politique et ce sont les civils innocents qui meurent».
Il parle aisément de ses envies d’ailleurs, «je suis à quelques kilomètres d’Israël et je n’y ai pas accès. D’ailleurs, dès qu’il s’agit de voyager c’est tout de suite compliqué sauf en Jordanie et en Turquie. Toi, tu peux aller où tu veux quand tu veux, c’est la vraie différence entre nous», constate-t-il. L’école est un fardeau pour lui qui est épris d’ailleurs et de liberté. Son bac en poche, il ira étudier à Washington aux Etats Unis. Attention, il ne s’agit pas de fuir son pays «J’aimerais faire mes études, travailler une dizaine d’années le temps d’économiser et monter mon propre business en Palestine pour être indépendant». Mais son désir profond est de «vivre du skate» car il est sûr d’une chose : «le skate peut emmener la paix en Palestine» !