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Avec la crise libyenne, une nouvelle route migratoire africaine s’est ouverte, non plus vers l’Europe mais vers Israël. Avant d’atteindre un hypothétique eldorado au pays de la terre promise, les migrants doivent traverser le Sinaï, vaste territoire de 60 000 km2, où règnent des trafiquants d’êtres humains. Etat des lieux avec Karin Keil, responsable du Bureau pour les questions relatives aux Réfugiés et aux Migrations de Caritas Autriche, membre de la Commission sur les Migrations de Caritas Europa.

Propos recueillis par Mohamed El Amine Mahieddine.

Quelle est la situation des migrants africains dans le Sinaï ?

Les réseaux criminels qui opèrent dans le Sinaï dirigent des camps de torture. Ils détournent des réfugiés en route vers l’Union Européenne ou Israël et les emmènent dans ces camps pour réclamer une rançon à leur famille.

De quels pays ces migrants sont-ils originaires ?

Ce sont principalement des réfugiés érythréens et soudanais.

Pourquoi migrent-il et en quoi sont-ils victimes de trafic d’êtres humains ?

Les réfugiés quittent leur pays en raison de l’oppression des régimes politiques en place et recherchent par conséquent la liberté et la protection. Mais sur leur route, ils sont kidnappés et vendus d’un groupe de terroristes à un autre jusqu’au Sinaï. Une fois là-bas, ils subissent toute sorte de torture : des électrochocs, des viols en réunion, des coups, des brûlures, des marquages au fer rouge, des enterrement dans le sable, des privations de nourriture et d’eau, etc. Ces tortures durent pendant des mois et leur familles sont forcées d’entendre leurs souffrances au téléphone. Il leur est demandé de payer une rançon de l’ordre de 30 000 à 40 000 dollars par personne pour être libérés.

Qui kidnappent ces gens ?

Ce sont des réseaux criminels constitués d’individus originaires de clans et de tribus bédouines du Sinaï. Mais il est très important de garder à l’esprit que toutes les factions bédouines ne se livrent pas à ces activités criminelles, ce n’est pas une caractéristique de leur communauté.

Quelle est la solution pour arrêter ces trafics ?

Il faudrait que la communauté internationale mette la pression sur le gouvernement égyptien pour intervenir militairement dans la région et stopper ce phénomène.

Combien de personnes sont concernées par ces trafics d’êtres humains ?

Il y a entre 150 et 250 personnes enfermées constamment dans des camps, tout en sachant que certains partent et d’autres arrivent. Actuellement, les victimes des tortures recensées à l’extérieur des camps sont de l’ordre de 1 000 dans la région du Caire et de 7 000 en Israël.

Quel est le profil des victimes ?

Tous les profils sont concernés, que se soit des hommes, des femmes ou des enfants ainsi que des familles, mais la proportion de femmes est relativement importante.  20% de ceux qui sont arrivés en Israël étaient des femmes sur l’année qui vient de s’écouler. Elles recherchent avec leur départ, la sécurité qu’elles n’ont pas dans leur région. Se sentant moins vulnérables, elles partent avec leurs enfants en espérant qu’elle ne subiront pas de viol et qu’elle affronteront moins de violence, mais c’est le contraire qui se passe. Les enfants se retrouvent même à observer les violences subies par leur mère et lorsque les enfants se mettent à pleurer, les violences envers la mère augmentent jusqu’à ce qu’ils cessent de pleurer.

Quand a débuté ce phénomène ?

Nous avons observé ce phénomène pour la première fois en 2009, quand les femmes réfugiées en Israël ont demandé plus d’avortements. La majorité des réfugiés étaient en Israël jusqu’à l’été dernier, c’est à ce moment qu’a été mise en place la loi anti-infiltration avec la construction d’une clôture entre Israël et l’Egypte, ce qui a rendu la tâche beaucoup plus difficile pour entrer dans le pays.

Il est important pour la société civile et les ONG à travers le monde de soutenir le travail des organisations travaillant sur ces problématiques. S’il vous plait, suivez mon appel à inviter les activistes de la défense des droits de l’homme d’Israël à agir.

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